đ Une origine ancrĂ©e dans lâhistoire
PerchĂ©e dans les montagnes verdoyantes du sud du Liban, la ville de Jezzine est connue pour ses cascades majestueuses, sa pinĂšde centenaire, ses paysages bucoliques… mais aussi pour un artisanat unique en son genre : les fameux couteaux de Jezzine.
Cet artisanat remonterait au XVIIIe siĂšcle, lorsque des familles chrĂ©tiennes maronites, fuyant les troubles ottomans dans la rĂ©gion de Deir el-Qamar, s’installĂšrent Ă Jezzine. Parmi elles, plusieurs artisans couteliers qui apportĂšrent leur savoir-faire. Rapidement, la ville devint un centre artisanal de rĂ©fĂ©rence, notamment grĂące Ă la proximitĂ© de la forĂȘt pour le bois et aux mines de mĂ©tal disponibles dans la rĂ©gion.
đȘ La particularitĂ© des couteaux de Jezzine
Les couteaux de Jezzine ne sont pas de simples outils. Ils sont de vĂ©ritables Ćuvres dâart.
Voici ce qui les rend uniques :
- Le manche sculptĂ© : il est ornĂ© Ă la main, souvent en forme d’oiseau â typiquement un paon â ou de tĂȘte dâaigle. Ces motifs sont hĂ©ritĂ©s de lâiconographie ottomane et symbolisent Ă la fois la noblesse et la vigilance.
- Les matĂ©riaux : le manche est en bois de chĂȘne, corne, nacre ou ivoire synthĂ©tique, souvent incrustĂ© de mĂ©tal et de motifs floraux.
- La lame : en acier trempé, fine et durable. Elle est parfois simple (couteau pliant), parfois multiple (fourchettes, tire-bouchons, petits outils).
Ces objets sont fabriqués avec précision et patience, chaque piÚce pouvant prendre plusieurs jours de travail.
đ€ Un symbole dâhonneur et dâhospitalitĂ©
Dans la tradition libanaise, offrir un couteau de Jezzine est un acte hautement symbolique. On lâoffre pour marquer :
- Un mariage
- Une visite importante
- Une reconnaissance ou un respect profond
- Une relation diplomatique
Ces couteaux sont souvent gravés du nom du destinataire ou de la famille. Ils sont transmis de génération en génération comme objets patrimoniaux. Dans certains foyers, ils ornent les murs ou les vitrines, témoins du lien entre artisanat et identité.
đïž Lâartisanat en mutation
Pendant longtemps, chaque famille de Jezzine comptait un ou plusieurs couteliers. Aujourdâhui, cet art est en voie de disparition, face Ă la modernisation, la mondialisation et la dĂ©sertification rurale.
Mais quelques ateliers familiaux perdurent, perpĂ©tuant les gestes et les secrets. Certains artisans s’adaptent :
- Vente en ligne
- Création de piÚces sur mesure pour des collectionneurs
- Participation Ă des salons dâartisanat international
- IntĂ©gration de motifs modernes ou dâautres formes dâobjets (couteaux de poche, accessoires de cuisine haut de gamme)
đș Un savoir-faire Ă prĂ©server
Les couteaux de Jezzine font partie du patrimoine artisanal libanais. Leur survie dépend de :
- La transmission des compétences à la jeunesse
- Le soutien des institutions (label, reconnaissance, subventions)
- L’Ă©veil dâune nouvelle conscience locale et diasporique pour consommer local et valoriser lâauthentique
đż Conclusion
Acheter ou offrir un couteau de Jezzine, ce nâest pas simplement acquĂ©rir un bel objet. Câest entrer dans une histoire, dans une mĂ©moire, dans une fiertĂ© artisanale et culturelle.
Câest le geste dâun peuple qui continue de rĂ©sister par la beautĂ©, la finesse, le travail des mains.
Et câest, peut-ĂȘtre, lâune des plus belles maniĂšres de dire : je te respecte, je tâhonore, je te confie un symbole.